Après un bac pro techniques d’intervention sur installation nucléaire à l’émulation dieppoise, Lisa Guilbert, 19 ans, est en dernière année de BTS environnement nucléaire. Sous l’égide bienveillante de son tuteur, Guillaume Robin, elle poursuit son apprentissage chez EDF au sein du service prévention des risques à la centrale nucléaire de Penly, près de Dieppe. Regards croisés sur un métier plein de sens et d’avenir.

Pourquoi et comment avez-vous choisi cette voie ?

Lisa Guilbert : J’ai commencé par un lycée général à Rouen, au lycée Blaise Pascal, mais je ne me projetais pas dans un secteur. C’est grâce à mon grand frère que j’ai découvert le Bac Pro Techniques d’Intervention sur Installation Nucléaire à l’Émulation Dieppoise. Il avait suivi le même parcours et m’a conseillé de m’y intéresser. Au début, j’ai eu très peur : quand je suis arrivée en Bac Pro, via une passerelle directe en seconde année, j’étais la seule fille de ma classe ! Mais c’était une bonne surprise de voir qu’à la Centrale de Penly, où j’ai fait mon alternance en Terminale, il y avait beaucoup de femmes. Tout le monde était accueillant, cela m’a vraiment rassurée ; dans ce milieu, tout le monde est le bienvenu.

Après le bac pro, j’ai poursuivi avec un BTS Environnement Nucléaire au lycée Pablo Neruda de Dieppe, ce qui m’a confortée dans mon choix de travailler dans le secteur nucléaire. On apprend beaucoup via des cours d’électricité, de génie civil, de mécanique, de physique chimie… ça englobe beaucoup de métiers.

Guillaume Robin :  Moi j’ai 36 ans, et j’occupe le poste de Manager Première Ligne Délégué de l’équipe prévention des risques sur le CNPE de Penly. Lors de mes études en licence, j’ai découvert les domaines de la QHSE (Qualité, Hygiène, Sécurité et Environnement). Après un passage de 10 ans chez Enedis où j’ai mis à contribution mon BTS électrotechnique, j’ai souhaité revenir dans ces domaine QHSE qui sont en lien avec mon bac +3… En 2018, j’ai été muté chez EDF au CNPE Penly en tant que technicien prévention des risques, puis un passage par les postes de chargé de préparation et de chargé d’affaires projet. Depuis janvier 2024, je suis manager Première ligne délégué d’une équipe de 36 personnes.

Qu’est-ce qui vous plaît dans ce métier ?

Guillaume : Une centrale nucléaire est un site industriel très particulier, les risques y sont multiples et nous nous devons, pour la sécurité des personnes et la protection des intérêts et des biens, de veiller au respect strict de toutes les règles qui y sont applicables. Aujourd’hui, l’électricité est un service public et cela me plait de devoir veiller à la bonne production de notre énergie afin de faire vivre notre pays.  

Lisa : On y retrouve aussi différents métiers, avec plusieurs débouchés. On est appui conseil dans le domaine de la radioprotection, incendie et sécurité, on fait beaucoup de contrôles pour éviter que le public ne soit exposé à ce que l’on peut trouver dans des centrales, mais aussi des contrôles pour vérifier qu’il n’y a pas de contamination, de radiation, on s’assure aussi que le matériel est propre, en passant d’une zone à une autre… c’est très varié, et j’aime beaucoup le contact humain et les interactions avec les différentes équipes. Chaque jour est différent, on découvre toujours quelque chose de nouveau. Par exemple, une journée je peux m’assurer que les intervenants ont bien leur permis feu avec le matériel à jour, et une autre, je peux être en train de contrôler des garde-corps. Je ne me dis jamais que je suis inutile, ça donne du sens.

Ce métier ne connaît pas la routine, il faut aimer l'inattendu et être toujours prêt à découvrir de nouvelles activités.

Quelles compétences sont essentielles pour réussir ?

EDF – Marc Caraveo

Guillaume : Je dirai la diplomatie et la patience, la force de conviction, ainsi qu’un bon calage de l’œil afin de détecter des situations à risques ou en écarts.

Lisa : Il faut aimer le contact avec les gens et apprécier le travail en équipe, car on n’est jamais tout seul. Il est aussi important d’aimer ce que l’on fait, apprécier la découverte, les activités qu’on ne connaît pas ou peu.

Comment pensez-vous que votre métier va évoluer, dans le futur ?

Lisa : Je pense que le secteur nucléaire continuera à se développer, notamment avec l’ouverture de l’EPR 2 à Penly, qui va offrir de nouvelles opportunités.

Guillaume : Et avec les progrès actuels, la technologie va certainement nous permettre de donner un second souffle à la sécurité

Quels sont les atouts de la Normandie pour votre métier ?

Guillaume : Avec le CNPE de Penly, le CNPE de Paluel et le CNPE de Flamanville, la Normandie est très attractive pour la filière du nucléaire, bénéficiant même de la construction des deux premiers nouveaux réacteurs de type EPR2 à Penly. Bon nombre de postes sont déjà à pourvoir et ce, dans de multiples domaines d’activité. Et puis la Normandie est dotée d’une histoire et d’un patrimoine très riche, malgré une météo parfois peu clémente, il fait bon y vivre !

Lisa : La Normandie est une terre d’énergies, et proche de la mer. Nous avons plusieurs centrales à proximité, comme Paluel, Flamanville, et bientôt l’EPR 2 à Penly. C’est une région je pense, qui est dynamique, avec beaucoup d’opportunités dans le secteur industriel et nucléaire. J’aime beaucoup ma ville de Rouen, je suis proche du centre-ville donc j’adore y vivre ! Et être proche de la mer pour travailler, c’est chouette aussi (rires).

Parlez-nous du prix Fem’energia, qu’est-ce que c’est exactement ?

Lisa : Le prix Femme-energia est un prix national qui met en avant la place des femmes dans le nucléaire. J’ai dû raconter mon parcours et mes aspirations. En août 2023, j’ai appris que j’étais dans les trois premières finalistes, parmi la cinquantaine de participantes et lors de la cérémonie en novembre, j’ai eu la surprise de découvrir que j’avais gagné. C’est une reconnaissance importante pour moi, et je suis fière que mon lycée, l’Émulation Dieppoise, m’ait poussée à participer. Ce prix est organisé par EDF et WIN France, et il met en avant les femmes à tous les niveaux du secteur, des jeunes diplômées aux femmes avec plus de dix ans de carrière.

Lisa est un exemple à suivre. Je suis très fier d’elle. Son parcours est honorable et je suis persuadé que ce n’est que le début !

Que dire à des jeunes, et notamment aux femmes, qui hésitent à s’engager dans la voie de l’industrie et du nucléaire ?

Guillaume : Foncez ! Vous allez vous régaler ! Et l’apprentissage est une chance car cela permet d’apprendre un métier et de mettre un pied dans le milieu professionnel. L’apprenti.e est rémunéré.e et bénéficie des mêmes avantages que les salariés. En tant que manager, c’est pour moi un véritable vivier de futurs talents.

Lisa : Qu’il faut toujours croire en soi et ne pas avoir peur du jugement, même si c’est un métier traditionnellement masculin. Il faut croire en ses capacités et oser tester par soi-même !

WiN FR-UK

Lisa est membre de WiN FR-UK (pour Women in Nuclear) qui lui a permis de se rendre au Royaume-Uni cette année dans le cadre d’un échange, découvert sur LinkedIn. Avec elle, une trentaine de femmes ont ainsi découvert le nucléaire outre-Manche. Le match retour est prévu prochainement.

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