Président de PGS Group, situé près de Rouen en Seine-Maritime, Jean-Louis Louvel a été récompensé du prestigieux titre « Entrepreneur de l’année » 2023 par le cabinet EY. Une première pour un chef d’entreprise du territoire. Rencontre avec un Normand aux valeurs inspirantes, engagé pour un monde plus durable.
PGS, c’est quoi ?
PGS signifie Palettes, Gestion, Services. Un ovni dans le monde de la palette où bien souvent les entreprises portent le nom du dirigeant… mais il y a plus de 30 ans, je me disais que Louvel Palettes, ça n’allait pas faire top ! (rires).
Plus sérieusement, nous nous concentrons sur le BtoB avec un produit souvent négligé dans la vie quotidienne, mais qui est essentiel pour le transport, puisque 95% des marchandises dans le monde sont transportées sur une palette.
Nous proposons divers services liés à son utilisation, de la fabrication à la gestion des flux en passant par son reconditionnement, l’activité par laquelle nous avons débuté il y a près de 30 ans.
La palette ? D’apparence, c’est un produit qui n’a pas l’air disruptif mais qui est indispensable dans la chaîne logistique. C’est l’occasion de montrer qu’on peut faire des belles choses avec des produits pas forcément sexy.
Quels sont ses points forts ?
Là où nous sommes innovants, c’est que nous proposons des services de reverse logistique : au lieu de vendre purement et simplement la palette, nous demandons par exemple à nos clients où ils expédient les palettes afin que l’on puisse les collecter et les remettre en circulation à proximité.
Que représente ce prix ?
C’est un prix symbolique à plusieurs titres : c’est la première fois qu’il est remis à un Normand en 31 ans et que j’ai pu partager avec mes deux amis et associés qui ont démarré avec moi il y a plus de 30 ans. Je suis autodidacte, j’ai arrêté l’école à 16 ans : donc forcément c’est aussi une belle reconnaissance. Cette récompense me touche mais ça me fait surtout plaisir de la partager avec mes deux associés, mes proches, mes deux filles qui étaient présentes, et mes collaborateurs.
J’ai du mal avec le mot fierté, parce que je prône l’humilité, mais je suis très heureux de pouvoir ramener ce titre à ma région, pour la première fois, ainsi qu'à la filière bois, qui est une grande famille !
Pourquoi est-ce important de contribuer à une industrie durable ?
Il y a 30 ans déjà, cela m’avait choqué de découvrir que certains concurrents remontaient des palettes vides de Bordeaux à un client à Lille – écologiquement, cela n’a pas de sens – c’est comme cela que j’ai eu l’idée de faire un maillage. Il y a trente ans, on reconditionnait déjà les palettes – et quand on est parents, on doit être d’autant plus sensibles à quel avenir et à quelle planète on va laisser à nos enfants.
Dans mon métier, honnêtement, on ne peut pas être plus responsable, plus vertueux, c’est d’autant plus important d’agir en responsabilité, surtout dans la filière bois :
En plus, PGS a développé un maillage qui permet de travailler des zones courtes tant sur les approvisionnements sur les scieries, que les palettes neuves ou reconditionnées sans oublier le développement de services innovants, liés au lieu de vente des palettes.
Je ne suis pas inquiet pour la planète, pas le moins du monde ; je suis inquiet pour mes enfants. La planète reprendra un jour ses droits mais peut-être qu’il n’y aura plus d’humanité. Je suis plus inquiet pour l’humanité que pour la planète.
C’est quoi, pour vous, être entrepreneur aujourd’hui ?
Je fais une différence entre un homme ou une femme d’affaires et un, une entrepreneur(e). Les hommes d’affaires sont là pour amasser de l’argent – avec l’objectif d’en amasser plus que la veille – alors qu’un entrepreneur ou une entrepreneure, va construire, va bâtir, pour que cela ait du sens, et surtout que ce soit pérenne dans le temps.
On prône aussi l’épanouissement de nos collaborateurs et collaboratrices ; s’ils sont bien chez eux, ils seront bien chez nous et surtout, s’ils sont bien chez nous, ils le seront d’autant plus chez eux, dans leur vie personnelle. L’épanouissement est aussi professionnel.
Quels sont les atouts de la Normandie pour entreprendre ?
Moi qui suis dans l’industrie, je vois ses lettres de noblesse réapparaître. En France, on a laissé dépérir des savoir-faire, laissé partir des belles industries à l’étranger, très loin souvent, ce qui est un non-sens écologique. En Normandie, on a la chance d’avoir un président de Région hyper actif, qui a su rallumer la flamme des Normands. J’avais toujours connu une division entre la Haute et la Basse Normandie ; depuis, de nombreuses barrières sont tombées.
- On est la région la plus industrialisée de France en termes de PIB par habitant ;
- on a une façade maritime – sinon la plus grande – majeure et exemplaire avec des ports complémentaires ;
- on a des réseaux autoroutiers comme il se doit ;
- de belles pépites industrielles
- et une vraie proximité avec la capitale…
Mais ce que j’aime par-dessus tout, c’est que la Normandie est une région à taille humaine. Ici, la Haute et la Basse réunies, on se ressemble, on s’assemble, on n’a pas de profondes différences culturelles. Maintenant que tout le monde communique, ça permet de créer des petits réseaux, dans l’entrepreneuriat ou autre ; on est réactifs, on est solidaires ; la Région centralise beaucoup de choses aussi, à travers l’AD Normandie, si l’on veut s’implanter, c’est le point d’entrée à solliciter.
Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui souhaiterait entreprendre ?
Je pense qu’il faut suivre son intuition. Évidemment, il y a plus de risques qu’être salarié. Une des grandes qualités à avoir, c’est la persévérance pour franchir les embûches. Il faut persévérer sans tomber dans l’obstination : la frontière est très mince. Mais ne rien lâcher, aller jusqu’au bout parce qu’on ne peut pas acheter les regrets, on ne peut pas revenir en arrière, ou acheter le temps.
J’ai fait plein de choses dans ma vie – certaines n’ont pas fonctionné – mais je suis allé au bout de mes convictions, de mes idées, j’ai essayé. Je n’ai plus cette peur d’échouer, ou du regard des autres. Et si ça ne marche pas, au moins j’aurai appris.
Il faut se donner à fond, à 200% mais ne pas sacrifier ses proches pour autant. J’essaie et j’ai toujours essayé de me dégager du temps, notamment pour mes filles, pour ma famille. C’est une vraie peur que j’ai eue – de passer à côté de l’essentiel. Apprendre à bien se connaître est aussi très important.
Enfin, à titre personnel, qu’est-ce qui vous plaît ici ?
J’ai toujours vécu en Normandie et je me suis rendu compte que je ne la connaissais pas bien. Je suis Havrais d’origine, Rouennais depuis plus de 30 ans… Depuis la réunification, j’ai découvert plein de choses que j’ignorais sur la région, y compris sur l’économie. Tous les endroits sont différents, on a un territoire qui est particulièrement vert, grâce à son climat qui est de plus en plus agréable. J’aime aussi beaucoup notre littoral varié. C’est aussi une terre d’accueil : avec beaucoup de taiseux mais qui sont surtout des « faiseux ». Je dis souvent que la Normandie est la région de France où l’on peut dire que la maxime « vivons heureux, vivons cachés »… est adaptée. Et pourtant, il y a de belles histoires à raconter, de belles entreprises, il ne faut pas hésiter à communiquer !
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