Béton, église et bonbons
14h30, au pied du Volcan. Nous y retrouvons Sandrine, Gwennaëlle et Laetitia, trois guides de Normandie, chargées de faire découvrir les mystères du Havre, de son histoire et de son architecture. Trois groupes se forment : c’est parti pour une balade « sensorielle » avec Sandrine. Premier jeu : la guide distribue des enveloppes d’où se dégage un même arôme puissant ; identifiable, les jeunes doivent qualifier ce qu’il évoque pour eux, sans le nommer. « Cela me rappelle le matin », « les matins difficiles de semaine » renchérit un autre dans l’amusement général. Vous l’aurez peut-être deviné : les enveloppes fleurent bon…le café ! Une manière astucieuse d’évoquer les origines de la ville, 1er port en France pour l’importation de café. Dans le paysage, le Volcan, imaginé par Oscar Nieyemer, et surnommé affectueusement « Le pot de yaourt » par les Havrais : le petit groupe se positionne en face, au pied du monument aux morts, seul vestige d’avant-guerre.
« 90% de la ville a été rasée par les bombardements. Elle a été libérée tardivement – le 12 septembre – par rapport à d’autres villes normandes. Les 5 et 6 septembre 1944, en deux fois deux heures, 300 avions britanniques ont largué 350 kg de bombes par mètre carré » souligne la guide.
L’occasion d’un nouveau jeu avec différents bonbons. Au-delà de la touche sucrée bienvenue : faire appel à sa vue et son ressenti pour trouver les deux douceurs qui se rapprochent respectivement le plus de l’architecture du volcan et des immeubles havrais. A l’unanimité, c’est le chamallow – pour sa forme cylindrique – et la pastille Vichy – qui sont identifiés. « Pour reconstruire la ville, on fait appel à Auguste Perret, architecte belge, attentif à respecter le triangle monumental originel du 17ème, ou se situait, à chaque extrémité, un édifice vertical. Pour remplacer les 150 ha rasés dans le centre par les bombardements, il imagine 1000 blocs » explique Sandrine. Son architecture est guidée par trois principes : l’air, la lumière et l’espace. Grandes places, appartements avec double orientation, et pas de murs porteurs, remplacés par une seule et même colonne. Quant au béton, intégrant ardoise et brique, gravillonné ou martelé, il regagne ses lettres de noblesse en offrant différentes nuances.
A quelques pas, rendez-vous au pied de l’Eglise Saint-Joseph, dont la tour, haute de 107 mètres, est visible à 60 km à la ronde. Pour explorer le lieu, les jeunes en file indienne, placent un petit miroir sous leur nez, couché à environ 45°. Objectif : apprécier hauteur, couleur et majesté de l’endroit.
Premières impressions, une fois assis : « vertige, gigantesque, élévation, flottant, coloré, impressionnant… » Les adjectifs fusent. « Vous avez tout compris ! » amorce la guide, enthousiaste. 50 000 tonnes de béton, 700 tonnes d’acier ont été nécessaires pour édifier l’église. Une véritable prouesse technique enrichie des 12 768 couleurs des vitraux carrés ou losanges, désignés par une amie d’Auguste Perret. Les jeunes sont également surpris par le décor, qui emprunte ses codes au théâtre : la scène au centre, mais surtout les sièges, de type strapontins, détonnent dans l’église, tout comme le lino.