Le Centre François Baclesse de Caen et le Centre Henri Becquerel de Rouen sont les deux centres de lutte contre le cancer (CLCC) de Normandie. Établissements de santé privés à but non lucratif, ils ont trois missions principales dans le domaine exclusif de la cancérologie : le soin, l’enseignement et la recherche. Décryptage de deux établissements qui font référence sur le territoire, dont les recherches et spécificités sont sources d’espoir, et font rayonner la Normandie.

Mammographie baclesse

Des centres dédiés, pour qui, pour quoi ?

Le sujet n’est certes pas joyeux mais il est essentiel. Mis en place par le Général de Gaulle, qui considérait le cancer comme une maladie « à part » du fait de sa fréquence et de sa prise en charge thérapeutique très lourde, les Centres de lutte contre le cancer ont cette particularité d’être exclusivement dédié à cette pathologie, à travers trois missions : le soin, l’enseignement et la recherche.

En dehors de nos domaines d’excellence respectifs, on fait tous de la recherche, on forme tous des professionnels de santé et on offre un accès aux soins extrêmement performant

Leur statut d’ESPIC (Etablissement de Santé Privé d’Intérêt Collectif) garantit également une égalité d’accès aux soins pour tous, gratuits, et une vraie expertise collective, la pathologie nécessitant l’intervention de plusieurs spécialistes exclusivement dédiés à la structure et ne pratiquant ni activité libérale, ni dépassement d’honoraires : oncologues médicaux et radiothérapeutes, chirurgiens, anapathologistes, médecins nucléaires, professionnels des soins de supports… « Cette pluridisciplinarité sur site permet de définir un schéma thérapeutique au plus proche du type de cancer, et donc de l’adapter au mieux au patient et à sa pathologie » explique Marie Parain, responsable de la communication du centre Henri Becquerel de Rouen. S’il existe 20 établissements similaires sur le territoire national, chacun des deux centres normands est reconnu pour un ou plusieurs domaines d’excellence.

RCP Baclesse
©Centre Henri Becquerel

Protonthérapie et génomique à Caen

Depuis 2018 et l’arrivée du Proteus One, Caen est par exemple devenu l’un des trois centres français de traitement par protonthérapie. « C’est une technique de radiothérapie qui n’utilise pas les rayons X mais des ions chargés de protons, ce qui permet de délivrer une dose très précise sur la tumeur, sans endommager les tissus alentours » explique le Pr Marc-André Mahé, directeur général. Cette technique s’inscrit notamment dans le projet ARCHADE, programme européen de recherche en hadronthérapie mené en Normandie, et n’est utilisée, pour le moment, que pour traiter des cancers inopérables dits « de la tête et du cou » chez l’enfant et l’adulte.

Les projets de recherche sont organisés en plateforme et bénéficient de l’expertise de nombreux acteurs, laboratoires et infrastructures du territoire : ganil, labeo, inserm, cnrs, cyceron…

Autre domaine d’excellence ? La génomique, qui, dans le cas spécifique du cancer, est l’étude des caractéristiques génétiques d’une tumeur afin de mieux prédire, diagnostiquer et traiter ces maladies de façon ciblée. Le laboratoire de génétique du cancer du Centre François Baclesse – l’un des premiers de France – a par ailleurs formalisé en septembre 2021, sa collaboration avec le Pôle d’analyses et de recherche de Normandie, LABEO. Leur ambition ? Mutualiser officiellement infrastructures, projets et équipements afin de faire de la Normandie une référence nationale en génomique, au service de la santé unique. « Un concept qui se base sur le fait que santé humaine, animale et environnementale sont toutes les trois étroitement liées » précise le Pr Mahé.

Autre exemple avec l’ouverture, mi 2022, d’une unité d’investigation, de recherche, d’innovation et de soins, afin de proposer à plus de patients des traitements innovants avant leur mise sur le marché, dans le cadre d’essais cliniques.

Isolateur baclesse
©Centre Henri Becquerel

Hématologie : recherche et diagnostic à Rouen

À Rouen, c’est dans le cadre de l’hématologie – pour les cancers « du sang », tels que lymphomes, ou leucémies – que l’expertise du Centre Henri Becquerel est notamment reconnue, l’établissement s’illustrant régulièrement dans le domaine de la recherche à l’échelle internationale. Un savoir-faire qui s’est dernièrement exprimé à travers les travaux du professeur Hervé Tilly, par ailleurs président de l’institut européen du lymphome : « son étude, publiée en décembre 2021 dans la meilleure revue de santé au monde, prouve que son traitement réduit les rechutes ou aggravations de 27%, et sans effets secondaires supplémentaires, par rapport au traitement existant, élaboré il y a 20 ans » s’enthousiasme Marie Parain. L’établissement est par ailleurs le seul en Normandie à avoir commencé à dispenser des Car-T Cells, traitement révolutionnaire pour certains cancers.

Notre établissement a une reconnaissance au niveau mondial pour l’excellence de sa recherche en hématologie. Le seul groupe de chercheurs normands à émerger de façon notoire dans ce domaine

Autre exemple ?
Dans ce même domaine, les recherches de l’unité INSERM du Centre ont mené à la création de Genexpath en 2020, une start-up accueillie par Normandie Incubation. L’idée ? Mettre à disposition du plus grand nombre, les travaux concrets des scientifiques pour déceler et distinguer certains types de tumeurs. « Les chercheurs ont ainsi créé et commercialisé des kits de diagnostic des lymphomes et sarcomes : l’idée n’est pas de faire de l’argent mais de les rendre accessibles à tous les professionnels, y compris à des laboratoires de ville. »

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©Centre Henri Becquerel

Projets et rayonnement

Les deux Centres de lutte contre le cancer normands continuent leur développement. Le Centre Henri Becquerel s’inscrit notamment dans une dynamique de modernisation et d’agrandissement. Contraint par les m2, il souhaite ouvrir un nouveau bâtiment à l’horizon 2025. « Il permettra de regrouper tout l’ambulatoire, c’est-à-dire les soins à la journée – les hôpitaux de jour pour les chimiothérapies, la chirurgie ambulatoire, les soins de supports – mais aussi les salles de consultation, l’accueil principal, une plateforme de coordination avec la ville, un parking… » Les lieux – reliés par une passerelle à l’ancien bâtiment – devraient également accueillir un pôle de prévention santé pour les scolaires. « Nous avons une intention très forte de casser les codes et de faire de cet hôpital un lieu qui ressemble à tout sauf à un hôpital » stipule Marie Parain.

Oser mettre de la couleur, parler de la vie… l’idée est d’amener une autre vision de la maladie

À Caen, on mise sur l’internationalisation et l’ouverture des soins aux patients étrangers. « Nous sommes sur une stratégie de développement à l’international » confirme Hermeline Delepouve, Directrice de la communication, des relations internationales et du mécénat du Centre François Baclesse. L’objectif ? Faire reconnaître l’expertise normande en-dehors des frontières, mais également traiter des patients qui n’auraient pas accès à la protonthérapie dans leur pays. Le Centre François Baclesse est ainsi intervenu, par exemple, en janvier 2022, lors de l’exposition universelle de Dubaï, dans le cadre de la quinzaine de la santé. « Promouvoir notre expertise en cancérologie à l’international, c’est tout de suite plus facile en mettant en avant la Normandie, dont la notoriété est bien ancrée à l’étranger. »

L'Hadronthérapie est développée à Caen Attractivité

Bon à savoir

Les deux centres normands sont membres du réseau Unicancer, qui fédère 19 CLCC et 1 membre affilié sur le territoire national. Le Centre Henri Becquerel et le Centre François Baclesse travaillent également de concert avec le CLCC de Lille, dans le cadre d’un partenariat « Grand Ouest » nommé C3, afin de mettre en commun expériences, bonnes pratiques et données.

Le Centre François Baclesse fait partie des 100 meilleurs hôpitaux spécialisés du monde selon le classement Newsweek 2021 et bénéficie d’une accréditation européenne – un label qualité délivré par l’OECI (Organisation européenne des centres de cancer). Le laboratoire de biologie et de génétique du cancer du Centre caennais a par ailleurs remporté le prix Unicancer de l’innovation 2022 avec GIScar, un score d’instabilité génomique pour les cancers de l’ovaire. En détectant les cicatrices génomiques tumorales, il permet de proposer un traitement efficace à environ 50% des femmes atteintes d’un cancer agressif de l’ovaire.

Quatre des chercheurs du Centre Henri Becquerel figurent dans le top 20 des spécialistes français dans la catégorie des lymphomes établi par le Comité national de coordination de la recherche et la la FHF (Fédération hospitalière de France) dans un rapport de 2021. C’est également le 2e centre de lutte contre le cancer de France en termes de publications et de renommée mondiale sur cette pathologie.

Fin 2022, le centre rouennais a reçu la 1er prix national de l’innovation lors de la convention nationale des Centres de lutte contre le cancer. L’équipe de chirurgie ambulatoire a été notamment récompensée dans la catégorie parcours professionnel dynamique, illustrant l’efficacité de cette unité, classée à la première place nationale en termes de mastectomie (enlèvement chirurgical d’un sein).

Autre exemple ?
Dans ce même domaine, les recherches de l’unité INSERM du Centre ont mené à la création de Genexpath en 2020, une start-up accueillie par Normandie Incubation. L’idée ? Mettre à disposition du plus grand nombre, les travaux concrets des scientifiques pour déceler et distinguer certains types de tumeurs. « Les chercheurs ont ainsi créé et commercialisé des kits de diagnostic des lymphomes et sarcomes : l’idée n’est pas de faire de l’argent mais de les rendre accessibles à tous les professionnels, y compris à des laboratoires de ville. »

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