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Recherche contre le cancer : un programme de pointe mené à Caen

En juillet dernier, le bâtiment du centre européen de recherche et de traitement en  hadronthérapie ainsi que le Proteus One, nouvel équipement de traitement des tumeurs par protonthérapie ont été inaugurés, à Caen. Rencontre avec le Professeur Khaled Meflah, président de l’association ARCHADE, le programme de recherche contre le cancer (Advance Ressources Center for HADrontherapy in Europe) mené en Normandie.

Comment est né le projet ARCHADE ?

Le projet ARCHADE est relativement ancien : il a démarré il y a une quinzaine d’années. C’est un projet d’hadronthérapie soutenu à l’origine par le Conseil Régional de Basse-Normandie qui souhaitait  mettre ce projet comme une priorité. A l’époque, deux projets  existaient au niveau national : le nôtre et le projet Etoile, développé par la région Rhône-Alpes. L’Etat a choisi de soutenir ce dernier au niveau national mais la Basse-Normandie a souhaité poursuivre le développement de l’hadronthérapie. Nous étions partis sur ce fameux Cyclotron, le C400, une machine qui devait se construire en Basse-Normandie avec une vocation de commercialisation par la suite. Le projet Rhône-Alpes s’est arrêté pour des raisons multiples : ne restait donc en France que le projet développé ici, toujours avec un soutien extrêmement fort de la Région Normandie. Notre projet était notamment de développer une nouvelle machine et de développer de l’hadronthérapie, en particulier de la carbone thérapie, c’est-à-dire avec des faisceaux d’ions carbones.  

Quelles sont les différences entre radiothérapie, carbone thérapie, hadronthérapie et protonthérapie ?

La radiothérapie, c’est le traitement le plus courant, par les rayons x. Elle est diffusée dans le monde entier. Ensuite, il y a de la protonthérapie, qui est de la radiothérapie avec des faisceaux protonsEn France, il n’y avait que deux centres : à Nice et Paris. Désormais, il y en a un troisième, le centre CYCLHAD, à Caen, qui a été inauguré en juillet dernier, avec Proteus One, le nouvel équipement. Ce dernier n’est qu’un élément du projet ARCHADE. Il n’était pas prioritaire mais a constitué une première étape avant le développement de l’autre radiothérapie : la carbone thérapie. Ce ne sont pas des rayons x, ni des protons mais des faisceaux carbones qui sont utilisés.

Pourquoi développer de nouvelles formes de traitement ?

Même s’il y a des progrès énormes qui ont été faits, les rayons X, les plus conventionnels, présentent des inconvénients, et notamment des effets secondaires qui peuvent avoir des effets délétères à long terme. Avec les rayons X, on guérit le cancer mais on risque un second cancer plusieurs dizaines d’années après, lié à l’irradiation. Chez un adulte, cela peut être un moindre mal mais chez un enfant, c’est véritablement plus problématique.

Quels sont les avantages de la protonthérapie ?

La protonthérapie apporte une amélioration : elle réduit de manière très significative le risque de second cancer lié au traitement. Chez un enfant en bas âge, lorsqu’il y a une radiothérapie protons, le  risque de deuxième cancer qui peut survenir 20 à 30 ans après est considérablement réduit, avec en plus une meilleure efficacité.

Recherche contre le cancer : un programme de pointe mené à Caen
Le Cyclotron 400 sera installé dans cette salle du centre Cyclhad – ©Cyclhad

Et la carbone thérapie ?

La carbone thérapie offre les mêmes avantages que la protonthérapie en termes de réduction des risques d’un deuxième cancer et elle est plus efficace en termes d’élimination de la tumeur. Elle est beaucoup plus performante que les protons. Lorsque vous avez des tumeurs qui sont résistantes, ou radio-résistantes, elles deviennent plus sensibles avec le carbone, qui offre par ailleurs une très haute précision.

En quoi est-ce innovant ?

Le caractère innovant du projet ARCHADE, c’est de proposer de la carbone thérapie mais avec un équipement qui n’existe pas encore, qui est de dernière génération et qui est beaucoup plus compact que les équipements actuellement en activité, au Japon ou en Allemagne. Là-bas, ce sont des machines qui font plusieurs dizaines de mètres de  périmètre dans de grands bâtiments et qui ne traitent que peu de  patients. Aujourd’hui, avec le Cyclotron C400, la machine qui va se développer à Caen, nous aurons une machine qui fera environ 6m de diamètre pour 2,50 de hauteur. Elle va en outre permettre d’utiliser et explorer, – ce qui est très intéressant et unique au niveau médico-scientifique – d’autres particules que les carbones.

Comment le projet ARCHADE s’organise-t-il ?

Cette machine, le Cyclotron 400, va être développée par la société Normandie Hadronthérapie. Pour constituer le projet, il a fallu mettre en place plusieurs partenariats. Le projet fonctionne ainsi en plusieurs entités mais qui concourent toutes au développement de ce C400. Vous avez donc le centre CYCLHAD, présidé et dirigé par Philippe Lagalle, qui a acquis le Proteus One, le nouvel équipement de traitement des tumeurs par protonthérapie, inauguré en juillet 2018 ; le centre François Baclesse qui a demandé l’autorisation de traitement en protonthérapie, et qui soigne des patients avec cette machine dans les locaux du centre. Mais au-delà du développement de machines, la vocation du centre CYCLHAD, c’est aussi le développement de la recherche avec la capacité d’accueillir des équipes de recherche du monde entier qui pourront utiliser les locaux et venir utiliser plus particulièrement les faisceaux de carbone pour poursuivre la recherche dans le domaine de l’hadronthérapie.  

Recherche contre le cancer : un programme de pointe mené à Caen
©Cyclhad

En quoi la Normandie et plus particulièrement Caen est plus à même de proposer de telles innovations ?

Tout cela se fait grâce à la présence d’un écosystème, qui à mon sens fait partie des sites exceptionnels au niveau international. Il  y a le GANIL, pour tout ce qui concerne la problématique des  faisceaux ; il y a CYCERON, pour tout ce qui concerne l’imagerie ; il y a  le LPC/ENSI Caen pour tout ce qui concerne la problématique de dosimétrie (i.e la mesure des doses en radioactivité n.d.l.r) et, bien sûr, le Centre François Baclesse où se trouvent les radiothérapeutes : ce centre a par ailleurs les équipements les plus performants en matière de radiothérapie conventionnelle, c’est-à-dire avec les rayons X. Ce sont eux qui prennent en charge les patients en protonthérapie dans le bâtiment CYCLHAD, où se trouve le Proteus One. Les médecins capables de traiter, les physiciens capables de maîtriser la problématique de la dosimétrie, le centre CYCERON pour l’imagerie et bien sûr le Ganil avec toute l’expertise dans le domaine des faisceaux : tout cela constitue un campus exceptionnel qui n’a pas d’équivalent en France.  

Recherche contre le cancer : un programme de pointe mené à Caen
©Cyclhad

Bon à savoir :

  • Le programme ARCHADE se trouve dans un tissu scientifique et médical  concentré d’un périmètre de moins d’un kilomètre au nord de Caen : le  CHU, le centre François Baclesse, le LPC (Laboratoire de Physique Corpusculaire) /ENSI Caen, le GANIL  (Grand Accélérateur National d’Ions Lourd), le centre CYCERON (centre  d’imagerie biomédicale), le centre CYCLHAD…

 

  • La première phase du programme ARCHADE réalisée par la société CYCLHAD,  c’est-à-dire l’achat de l’équipement Proteus One et la construction du  bâtiment du centre de recherche et de traitement ont coûté 76,5 millions d’euros. Les équipes de recherche disposent d’une surface de 800 m2 pour mener à bien leurs travaux.
  • Des  investisseurs privés, IBA, la SEM SAPHYN et un pool bancaire  participent au financement de cette première phase. La Région Normandie  soutient ce centre à travers sa participation dans la SEM SAPHYN à  hauteur de 22 millions d’euros ainsi que par le biais de premières  garanties d’emprunts à hauteur de 37 millions d’euros.

 

  • L’hadronthérapie est une technique innovante de lutte contre le cancer. Elle permet de détruire les cellules cancéreuses radiorésistantes et inopérables en les irradiant avec un faisceau de particules. La  radiothérapie conventionnelle utilise essentiellement des rayons X alors  que l’hadronthérapie utilise un faisceau de hadrons, notamment des  protons (on parle dans ce cas de protonthérapie) et des ions carbone (on  parle dans ce cas de carbone thérapie). (Source : France Hadron).

 

  • Suite à la création du centre Cyclhad et à l’acquisition du Proteus One inaugurés en juillet dernier, le service de radiothérapie du centre François Baclesse est en mesure de traiter, par convention, plus de 300 patients

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